Le sport enchaîne, le yoga libère
De six années de pratique de la gymnastique de compétition, je n’ai retenu que l’essentiel :
Le sport est l’art d’éviter.
L’art de soumettre son corps pour éviter la difficulté de l’écouter. L’art d’affronter un adversaire pour éviter la peur de s’affronter soi-même. L’art d’aller toujours plus vite dans le vide pour éviter l’angoisse d’aller toujours plus loin en soi-même. L’art de retenir sa respiration pour éviter la discipline que demande la maîtrise du souffle. L’art de créer le brouhaha (musique pendant les cours, télé dans les salles de sport, coach qui aboie) pour éviter d’entendre la cacophonie mentale qui nous assaille dans le silence. L’art de se faire mal pour éviter la culpabilité de se faire du bien.
Le sport est l’art d’oublier.
L’art d’oublier sa douleur, oublier ses besoins, oublier ses limites. Pourquoi ? Pour dilater des muscles ou forcer des articulations. Dans quel but ? « Se dépasser ». Autrement dit, courir plus vite, sauter plus haut, frapper plus fort. Pourquoi ? Pour avoir son heure de gloire. Pourquoi ? Pour oublier ses problèmes d’ego. La boucle est bouclée.
Si un nombre croissant de gens -dont je fais partie, se tournent vers le yoga, c’est parce qu’ils ont compris qu’il se situe à l’exact opposé du sport.
Le yoga est l’art de se rappeler.
L’art de se rappeler que nous sommes mus par une énergie résultant du parfait accord entre les émotions, la raison et le corps. L’art de se rappeler que, lorsque ces trois éléments prennent des directions opposées, c’est notre santé qui est en péril, et que seul leur alignement nous permet d’avancer dans l’équilibre et l’harmonie. L’art de se rappeler que le mouvement n’a de bénéfice que sous-tendu par une intention mentale et rythmé par une respiration en conscience. L’art de se rappeler que le corps n’est rien sans l’esprit, mais que l’inverse est tout aussi vrai.
Le yoga est l’art d’affronter.
L’art d’affronter le silence, empli de nos démons intérieurs que le brouhaha bâillonne. L’art d’affronter lenteur et calme, ennemis de la frénésie qui nous possède. L’art d’affronter l’immobilité, qui contrarie notre permanente agitation. L’art d’affronter tous les faux-semblants qui nous permettent de nous détacher d’un corps encombrant et d’un esprit encombré. L’art d’affronter ses peurs, ses doutes, ses faiblesses, pour faire naître la confiance, la sérénité, la force intérieure.
Pourquoi le yoga est-il l’« anti-sport » ? Car le sport est une extension du monde du travail : il renforce la culture de l’oubli de soi et justifie une attitude esclavagiste envers soi-même au nom de la performance.
Le yoga est l’ « anti-sport » : il nous donne le goût de la liberté, avant de briser nos chaînes.
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Le yoga soigne les blessures du corps et de l’âme
Il est insensé de chercher à guérir le corps sans soigner l’âme.
Platon
En matière de santé, il y a deux réalités que nous admettons rarement d’emblée :
- Aucune blessure ne survient par hasard. Par exemple, une personne hyperactive, qui ne mesure pas consciemment son état de stress et d’épuisement, peut se voir freinée par un lumbago (ou autre blessure typique).
- Toute douleur détient une signification, qu’il nous revient de déceler pour accéder à une meilleure compréhension de nous-même. Par exemple, une personne se plaignant d’un mal de dos somatise généralement un trop-plein de frustrations et de contrariétés. En d’autres termes, elle « en a plein le dos ». Accéder à la signification de sa douleur lui permettra de prendre conscience de son désir refoulé de changement (séparation, démission, déménagement, changement de rythme de vie…).
Les personnes qui s’initient au yoga pour soigner une blessure du corps et de l’âme ont dépassé le stade du déni. Elles ont accepté d’entendre le message dont la douleur est porteuse.
Ce que nous nions nous soumet. Ce que nous acceptons nous libère.
Carl Gustav Jung
Pour ces personnes clairvoyantes, la pratique du yoga va offrir un double effet. D’une part, le yoga comporte de nombreux bénéfices thérapeutiques d’un point de vue physiologique. D’autre part, la pratique du yoga est source d’une évolution psychique chez les pratiquants réguliers.
Grâce au yoga, une personne hyperactive apprend à se consacrer du temps, mais également à prendre conscience de son corps, à écouter ses besoins et à respecter ses limites. Pendant les séances de yoga, elle ralentit son rythme et se recentre sur elle-même et son bien-être, sans ressentir de culpabilité. C’est le début d’une restructuration psychique qui va la mener peu à peu à un changement durable.
Grâce au yoga, une personne souffrant d’une douleur chronique apprend à se ménager des moments de sérénité au coeur d’une vie subie, faite de frustrations et de contrariétés. Durant les séances de yoga, elle se découvre enfin en accord avec elle-même.
Le yoga nous invite à reprendre le contrôle du corps et de l’esprit, pour accéder à une vie plus en conscience et une forme de paix intérieure.
