Pilier 1

Troubles du sommeil : mon cheminement vers la guérison

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Ce que j’ai appris de mes six ans d’insomnie chronique

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu le sommeil fragile. Vestiges d’une enfance chaotique qui a teinté mon univers de la couleur de l’inquiétude, mes insomnies faisaient partie intégrante de moi. D’ailleurs, je les voyais comme le baromètre  de cet inexplicable sentiment d’insécurité qui me poursuivait jusque dans mes rêves. Mais à l’époque, j’ignorais comment me libérer de cette sensation étrange qui m’oppressait la poitrine, me nouait le ventre et m’enserrait le crâne dans un invisible étau. A cette époque, j’ignorais aussi que cette sensation se nommait « anxiété » et qu’elle était non seulement le plus répandu des troubles mentaux, mais également la cause première de l’insomnie. A cette époque, j’ignorais tout de l’anxiété, y compris qu’à l’instar de l’insomnie, elle n’était pas censée faire partie intégrante de moi…

Je me souviens du basculement qui a transformé les familières nuits agitées en une insomnie sévère qui allait durer six ans : ce basculement s’est produit lorsque je suis devenue « désaccordée ».

A l’âge de 23 ans, après mes études supérieures, j’ai embrassé par contrainte la carrière que mon grand-père avait choisie cinquante ans plus tôt par vocation. Je laissais derrière moi le rêve d’une profession-passion que je n’exercerais jamais. A cette époque, j’ai commencé à souffrir d’un « désaccord » entre mon conscient et mon inconscient. J’étais insatisfaite de ma situation, mais j’y persistais par pure raison, en faisant taire mon désir profond. C’est à ce moment que mon stress et mon anxiété ont muté : jumelés à mon « désaccord » mental, ils ont gagné en nocivité.

Jeune et naïve, j’avais cru mon rêve bien enterré sous le choix de raison. Mais j’ignorais que les rêves enfouis sont comme les fantômes : ils reviennent nous hanter.

Après seulement trois semaines à mon nouveau poste, lorsque je me suis allongée le soir venu, il ne s’est rien passé. Rien, jusqu’à ce que la sonnerie stridente du réveil me confirme que je n’avais pas fermé l’œil de la nuit. Je ne le savais pas encore, mais dans ma tête de « désaccordée », la guerre venait d’éclater. Mon Moi résigné, la partie de moi qui se rêvait en bon rouage de la société, voulait juste dormir pour avoir l’énergie de reproduire le lendemain la journée de la veille : il voulait la paix. En revanche, mon Moi profond, la partie de moi que rien ne pouvait soumettre, venait d’entrer en résistance.

Nuit après nuit, en tendant l’oreille, je percevais les chants guerriers qu’entonnait mon Moi profond à la tombée du jour. Mais ils demeuraient couverts par le brouhaha de mon Moi résigné. Car c’était lui et nul autre que je voulais écouter, persuadée que ma vie était pliée et tout changement de direction inenvisageable. Pourtant, nuit après nuit, la force qui maintenait mes yeux ouverts et mon esprit en éveil, c’était l’écho de ces notes solennelles, qui résonnait en mon être à mon corps défendant.

Au bout de trois mois sans sommeil, j’ai commis une erreur que j’allais payer de ma santé : la déléguer. Prompts à exploiter notre tendance à nous remettre entre les mains de tiers, certains médecins s’octroient deux droits qui nuisent gravement à la santé : nous déresponsabiliser et nous transformer en consommateurs. En effet, ils se permettent de décider que le patient rechignera forcément face à un traitement requérant temps et discipline et, au contraire, applaudira à la vue d’une pilule miracle, ne demandant que le temps d’être avalée. Ainsi, ce jour-là, mon médecin aurait dû me prescrire une psychothérapie pour exorciser ma souffrance, ainsi que des cours de yoga et de méditation pour mieux gérer mes émotions et retrouver le calme intérieur.

Il est insensé de chercher à guérir le corps sans soigner l’âme.

Platon

Cependant, au lieu d’un traitement de fond qui m’aurait appris à maîtriser mon corps et mon esprit, ce médecin m’a prescrit une boîte de somnifères, objet certain d’un juteux partenariat avec une entreprise pharmaceutique. En d’autres termes, au lieu de me responsabiliser, il m’a réduite à l’état de consommatrice ignorante et passive d’un médicament dangereux et ce, dans son intérêt personnel.

Unique échappatoire qui m’était offerte à l’enfer des nuits blanches, les somnifères allaient devenir à la fois mon radeau de la Méduse et mon naufrage.

Le meilleur des médicaments est de s’en passer.

Hippocrate

Après seulement quelques mois, j’étais devenue incapable de fermer l’œil sans somnifères. Mes premières prises se limitaient à un demi-comprimé, mais bientôt, ce dernier n’a plus fait le moindre effet. Chaque demi-comprimé supplémentaire m’octroyait un répit d’une dizaine de nuits : je les traversais d’un sommeil qui, à défaut d’être réparateur, me plongeait dans une léthargie moins pénible que l’état de veille. Toutefois, mon corps s’accoutumait à chaque nouvelle dose avec une systématisation diabolique. On l’aurait dit programmé pour me mener à ma perte. Ce que j’ignorais, c’est que, par ces signaux d’alarme, mon corps se démenait pour me faire prendre conscience que je m’embourbais dans une situation sans issue – ou plus plausiblement, à une seule issue…

Après plusieurs années d’insomnie chronique, je n’étais plus que l’ombre de moi-même. Je me rendais au travail comme une automate, pour y accomplir des tâches d’une qualité plus qu’approximative en ne pensant qu’à mon lit. Ma tendance à fermer les yeux pour tromper mon épuisement m’avait valu une réputation d’alcoolique, et mon regard vide, celle de toxicomane. Pourtant, hormis les somnifères, je n’étais dépendante qu’au sucre : je consommais de grandes quantités d’aliments sucrés pour me stimuler, ce qui augmentait mon surpoids et aggravait encore mon état général. Mon système digestif, privé de toute énergie, était quasiment à l’arrêt. Je multipliais carences et problèmes de santé, alors même que ma dépendance aux somnifères s’accentuait. Je ne supportais plus la vie que je menais et attendais avec résignation qu’une surdose de médicaments m’arrache un jour à une vie de laquelle je n’avais pas su tirer le meilleur.

Le jour de mes trente ans, j’ai entendu très distinctement un bruit déchirer la brume de mon esprit : c’était le son d’un tambour de guerre. Puis, a résonné celui des clairons et des trompettes. Pour la première fois depuis six ans et demi, le chant guerrier était plus qu’une sourde rumeur qui me tenait dans un éveil stérile. Il était haut et clair, tel une vague dont la puissance me portait et m’élevait vers les cimes.

Je venais de décider que le jour de mes trente ans marquerait un tournant dans ma vie. J’allais surmonter mes craintes et mes doutes, et m’autoriser enfin à vibrer. A la nuit tombée, j’ai jeté ma tablette de somnifères, posé la tête sur l’oreiller et, au son du tambour, je me suis endormie.

Cette nuit-là, mon Moi profond a gagné la guerre pour la reconquête d’un territoire perdu : celui de ma dignité.

Quand un esclave décide qu’il ne sera plus esclave, ses chaînes tombent.

Ghandi

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Comment je me suis libérée de l’insomnie chronique

Pour s’attaquer à un mal, il faut d’abord en connaître l’origine.

Les deux causes principales des troubles du sommeil sont l’anxiété et le stress.

Quand l’anxiété et le stress régnaient sur mes nuits

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours souffert de ces deux fléaux, qui pouvaient à leur guise transformer mes nuits en cauchemars.

L’anxiété

Allongée sur mon lit, tout commençait par un sentiment d’appréhension, de malaise diffus. Ensuite, je sentais ma gorge se resserrer sous l’effet d’une fébrilité inexpliquée, qui me faisait abondamment transpirer. Tout en m’agitant dans mon lit, j’ouvrais la bouche pour prendre de grandes inspirations qui compensaient à peine mon impression de manquer d’air. L’obscurité renforçait encore ma sensation d’oppression. C’était comme si le noir me happait. Quant aux quatre murs qui me cernaient, ils semblaient se refermer inexorablement sur moi. Alors, mon cœur se mettait à battre à tout rompre, jusqu’à la palpitation.

Le stress

Dans ma tête, les bribes de pensées fusaient en tous sens, hors de contrôle. Elles produisaient une telle cacophonie mentale que j’avais l’impression d’être une abeille au milieu d’une ruche. Mon stress orchestrait avec maestria ce perpétuel saut du coq à l’âne mental, me laissant épuisée. Le bruit assourdissant de mes pensées générait des acouphènes : j’entendais dans mes oreilles le bruit que faisait la neige dans les anciens téléviseurs débranchés. Ce parasitage mental empêchait mon endormissement. Au mieux, je basculais dans la somnolence, pour en émerger encore plus fatiguée, le sang me battant aux tempes. Neige dans les oreilles, feu dans les tempes.

Ma prise de conscience

A cette époque, si j’avais dû résumer mes nuits lorsqu’elles étaient gangrénées par le stress et l’anxiété, j’aurais choisi le mot « impuissance ». En effet, j’avais l’impression que mon corps et mon cerveau étaient assiégés par un invisible tyran. Je ne m’appartenais plus, je ne contrôlais rien.

Aujourd’hui, à la lumière de mes remises en question, j’ai compris que le mot qui résume le mieux ces six années n’est pas « impuissance » mais « leurre ».

En effet, derrière ma conviction d’être victime d’un tyran tout-puissant possédant mes tréfonds, se cachait mon refus d’admettre que ce personnage malveillant, c’était moi.

Comment ai-je surmonté le stress chronique et l’anxiété à l’origine de mes insomnies ?

C’est très simple : j’ai réduit au silence la partie de moi qui voulait me nuire, puis ôté le bâillon de celle qui me voulait du bien.

Comment ? Tout d’abord, en réalisant que j’en avais toujours eu le pouvoir. Ensuite, en trouvant la détermination de reprendre ce pouvoir dont je m’étais moi-même privée.

La façon la plus fréquente dont les gens abandonnent leur pouvoir est en pensant qu’ils n’en ont aucun.

Alice Walker (écrivain et militante féministe afro-américaine)

Comment ai-je repris le pouvoir sur moi-même ?

Après avoir levé les blocages inconscients qui m’empêchaient de fermer l’œil sans somnifères depuis six ans, je parvenais à trouver le sommeil une nuit sur trois ou quatre, à raison de quelques heures tout au plus. Bien que cette rémission me semblait une montée au paradis après un long séjour en enfer, j’ai réalisé que j’allais devoir reconquérir entièrement mes nuits pour recouvrer la santé.

Le bras droit du pouvoir est la connaissance. C’est ainsi que, pour reprendre le pouvoir sur mes nuits, j’ai commencé à lire, découvrir, apprendre, comprendre.

J’ai découvert la méditation, le yoga, la cohérence cardiaque et l’aromathérapie. J’ai appris que, bien au-delà des méthodes de relaxation, ces pratiques étaient de véritables philosophies de vie. J’ai compris des vérités essentielles qui, jusque-là, m’échappaient.

La méditation, c’est surmonter la souffrance, donner un sens plus profond à sa vie et accéder à une réalité supérieure.

L’aromathérapie, c’est accepter la bienveillance de la nature en renouant avec nos origines, et laisser nos sens s’enivrer des essences d’où renaît l’essentiel.

La cohérence cardiaque, c’est l’art de faire dans l’harmonie et la conscience ce que l’on peut faire dans le chaos et l’ignorance toute sa vie durant : respirer.

Le yoga, c’est jeter un pont entre le corps et l’esprit, s’ouvrir des horizons insoupçonnés entre mouvement, respiration, méditation et philosophie.

Si ces différentes disciplines m’ont permis de retrouver confiance et sérénité, le déclic à l’origine de cette évolution a été ma volonté de reprendre le contrôle de ma propre vie. J’ai repris le pouvoir.

Notre meilleur atout pour vaincre la maladie est notre pouvoir d’autoguérison.

Hippocrate

 

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